Mayenne
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Extrait
de la lettre manuscrite de Jérôme de Sageon datée du 23 avril 1701 et
conservée à la Bibliothèque d'Angers, sous la cote n° 1770 du catalogue
Molinier. " Les caves de sauge, ainsy apellées parce qu'elles sont proche le bourg de sauge mais neantmoins en ceste paroisse de thorigné ne sont autre chose que des concavités qui sont soubs une coline de rochers peu eslevée et platée par dessus lesquelles ont environ de deux cent pas de longueur l'entrée en est fort estroite et l'on trouve de temps en temps en droite ligne des lieux ou caves de diferentes façons les unes estant fort hautes et voutées comme de grandes chapelles les autres plus basses et estroites et le tout fort irregulier d'où l'on juge que c'est la nature plustot que l'art qui les a faites elles se terminent par un rocher qui est droit comme une muraille au pied duquel coule un petit ruisseau de la profondeur du genoüil les innocents disent que si on le passoit, on trouverait de l'autre costé tout l'or et l'argent qu'on pouroit souhaiter mais comme cela est impossible à cause dudit rocher etc Quand aux abus qui s'y commettent je vous avoües qu'ils sont tres facheux car par un bruit aussy faux et ancien que criminel on y vient journellement de touttes pars et de fort loin (car pour ceux d'auprès ils n'ont pas la foy) lesquels dans l'esperance qu'ils ont dy trouver de l'argent y aportent des offrandes au demon, comme moutons chiens chats, poulles et autres choses le tout de couleur noire lesquelles s'en retournent aussy riches les uns comme les autres ce qui est encore facheux c'est que pour mieux reussir en leur dessein ils disent qu'il faut estre hui jours avant que d'y entrer sans penser en Dieu sans le prier sans entendre la messe ni sans porter d'heures ny chapelet on ne peut aller dans les dites caves sans chandelle et il y a quelque temps qun particulier de la ville d'angers y estant entré la chandelle s'estant esteinte il y resta environ trois jours sans en pouvoir sortir et il y aurait aparemme pery si d'autres pelerins qui y vinrent ne l'ussent retiré du danger voyla Monsieur ce que je vous puis dire de ce beau lieu plain de bouë et de saleté dans lequel je ne suis allé qu'une fois depuis vingt ans qu'il y a que je suis curé et cela a la priere d'un marquis de mes amys qui m'engagea de le faire pour contenter aussi sa curiosité on a fermé plusieurs fois l'entrée desdites caves mais il se trouve toujours des malheureux qui les ouvrent. " Extrait de la description des caves à Margot par René Bouvet en 1706. " (Les caves) sont fameuses, moins par leur singularité que le concours d'une multitude de pèlerins, qui abordent de toute part pour y consulter le devin. Tout ce que j'ai pu découvrir sur cette superstition, c'est qu'une certaine fée qu'on nomme Margot, tient son empire au fond de cette grotte, et distribue de l'argent à ceux qui viennent lui en demander, moyennant la redevance d'un agneau, d'une poule ou autre animal manducable, pourvu qu'il soit noir. On y vient de trente et quarante lieues ; et parmi les pèlerins, il y en a qui annoncent par leur figure et leur accoutrement, qu'ils appartiennent à des familles honnêtes. Mais ce qui me frappa davantage, c'est que les femmes ne craignent pas d'entrer seules dans une caverne capable d'inspirer de la frayeur aux hommes les plus hardis. Le meunier, dont la maison est auprès du rocher, sait bien faire son profit de la simplicité et des offrandes de ces personnes crédules. Je ne manquai pas de le questionner en allant chercher du feu pour nous conduire dans ces caves, et il avoua que le soir du jour précédent, il y avait trouvé quatre poules. " Extrait
d'un texte manuscrit de l'abbé André-Pierre Ledru intitulé " Description
des grottes de Sauges, Département de la Mayenne " (Cordonnier, 1959). " (L'entrée de la cave à Margot) a été murée, et l'on remarque encore les débris de la clôture que l'on avait construite pour empêcher d'y pénétrer. C'est il y a environ 50 ans que les religieux des Chartreux, seigneurs de la paroisse, firent construire ce mur qui fit détruit la nuit suivante par les paysans des environs. Le guide, qui nous accompagnait, entra le premier avec une lumière. Munis de flambeaux, nous le suivîmes par cette ouverture où l'on peut pénétrer qu'en rampant l'espace de 3 à 4 mètres. Au bout de ce passage, nous nous trouvâmes dans une caverne assez élevée pour s'y tenir debout. Elle est à peu près de forme ronde et d'une grandeur médiocre. J'y remarquai des stalactites peu considérables, mais tapissent le rocher de marbre qui forme la grotte. (...) (Le sentier) va sensiblement en augmentant de largeur jusqu'à la fin et il est plus large vers le toit que vers le fond. Ce sentier est un de ceux qui contiennent le plus de stalactites ; on en remarque d'assez grosses attachées à la voûte et dont la forme est conique. C'est dans ce sentier que j'aperçus une grosse stalactite (stalagmite?) qui en soutenait une autre et imitait une colonne. La pente en est assez rapide ; parvenus au bout de cette issue, le rocher nous empêcha d'aller plus loin ; en tournant à droite, nous fûmes obligés de ramper et nous suivîmes une route assez raboteuse qui a 25 à 30 mètres de longueur. Elle varie pour sa largeur et la pente en est rapide. Arrivés à son extrémité, nous vîmes un trou large d'un mètre , et assez long. Sa profondeur est de 8 mètres. Descendus dans ce trou, à l'aide d'une corde, nous nous trouvâmes dans une caverne de 5 mètres de largeur de forme irrégulière. Il y existe un sentier très rapide, mais il nous fut impossible d'y pénétrer. L'ouverture trop rétrécie nous ôtait tout passage. C'est dans ce lieu que nous vîmes un amas d'eau sur le bord de laquelle nous observâmes des ossements d'un enfant. Ces ossements étaient un fémur cassé par la moitié, et un morceau de crâne. Cet espèce de lac est étroit et peu profond ; l'eau en est stagnante et ne paraît être due qu'à celle qui découle sans cesse de la voûte. Cependant, lorsque la rivière d'Erve croît, on prétend que le ruisseau de la grotte croît aussi ; ce qui prouverait que l'un et l'autre se communiquent. Le temps peu considérable que nous restâmes dans ces souterrains ne nous permit pas d'y faire des observations. Nous remontâmes au moyen de nos cordes et revînmes sur nos pas. Nous parcourûmes les sentiers que nous avions déjà suivis jusqu'à la grotte d'où partaient les autres. Nous nous dirigeâmes à droite et nous suivîmes un sentier long, difficile et très gênant : c'est un de ceux où il faut ramper le plus longtemps ou aller sur les genoux. Il est très raboteux et va toujours en montant, en formant des sinuosités nombreuses. On y trouve beaucoup de stalactites qui sont d'une grosseur assez considérable. Après avoir tourné, tantôt à droite, tantôt à gauche, nous parvînmes dans un salle qui a environ 15 mètres de largeur ; son toit est peu élevé et inégal. Les côtés en sont garnis de stalactites ; et dans le milieu on en trouve une par terre qui a à peu près 6 mètres de circonférence. Lorsqu'on la frappe, elle répand un bruit assez sonore. Sa forme est à peu près celle d'une cloche. Les paysans du canton l'appellent le Lit ou la Table de Margot. Nous descendîmes par le même sentier et nous en trouvâmes d'autres fort étroits, dans lesquels il est impossible de marcher. Le guide nous assura qu'il existait encore d'autres sentiers, mais nous ne pûmes y pénétrer. Cependant nos torches brûlaient bien, la respiration n'était nullement embarrassée ; le plus grand silence règnait dans ces souterrains, nous n'y vîmes rien qui pût nous inspirer la moindre frayeur ; nous n'aperçûmes aucune trace de reptiles ni d'autres animaux, si l'on en excepte cependant quelques chauves-souris qui se fixent à la voûte. Une chose à remarquer, c'est que le son ne se répète pas plus loin que le sentier où l'on se trouve. Un coup de pistolet que nous lâchâmes fut répété par un écho assez sourd, à une distance peu éloignée de nous. En général ces souterrains sont d'une grande longueur, et il serait très difficile d'en sortir sans avoir un guide. Les nombreux détours qu'on y remarque, les passages étroits que l'on rencontre, les pointes de rochers qui saillissent, tout cela ôterait les moyens de revenir à l'entrée de la caverne, qui par elle-même n'est pas très visible lorsque l'on est dedans. Il est assez difficile de juger de la profondeur totale des sentiers : il sont trop inégaux pour la déterminer au juste ; mais il est certain qu'elle n'est pas très considérable. Quelques stalactites se détachent de la voûte et nous en trouvâmes par terre d'assez grosses. Après avoir parcouru tous ces divers sentiers, nous sortîmes de cette grotte et nous fûmes en visiter une autre opposée à celle-ci, située sur la rive droite de l'Erve. Elle est connue dans le pays sous le nom de Cave à Rochefort. Quelle différence de cette grotte à celle d'où nous sortions! L'entrée en est très grande et a environ 8 à 10 mètres de hauteur sur 4 ou 5 de largeur. Cette grandeur est la même dans tout le sentier qui est assez droit et long de 20 à 25 mètres. On y marche sur des morceaux de marbre d'un petit volume et roulés. La grotte de Rochefort qui se trouve au bout de ce sentier est assez vaste et forme un angle à l'une de ses extrémités. Elle est longue de 30 à 35 mètres et large de 12 à 15. On y remarque très peu de stalactites ; elle se termine brusquement et sans aucun sentier. Les personnes qui vont dans ce souterrain ont coutume d'y allumer du feu, ce qui a tellement noirci la voûte de cette caverne qu'il est impossible de voir parfaitement son élévation, pourtant peu considérable. Il n'y a aucun écho dans cette grotte ; elle n'est nullement humide et le plancher argileux en est très solide. - Cette grotte ne semble point être l'ouvrage de la Nature. Sa forme presque régulière et sa large ouverture indiqueraient assez que ce fut jadis une carrière d'où l'on tira du marbre, et qui a été ensuite abandonnée. J'avance cette assertion sans vouloir cependant l'affirmer et, je laisse aux naturalistes instruits à décider sur cette opinion. Tous ces lieux sont dignes d'être vus, et il serait à désirer que des personnes savantes s'occupassent avec soin de l'examen de ces rochers qui méritent la plus grande attention. Au Mans, ce 16 floréal An XIII (lundi 6 mai 1805). Signé : Souligné. " Poème
de P. Delasalle (in A. du Peyroux, 1861, p. 308). " Naguère un bûcheron,
par un instinct fatal, |